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" Seuls ceux qui ont la mémoire longue sont capables d'envisager l'avenir " F. Nietzsche

" Les milliers de livres qui ont été écrits sur la shoah ne sont pas un rempart contre l'antisémitisme, puisqu'il existe toujours. Le seul rempart contre l'antisémitisme c'est l'engagement " S. Klarsfeld

Fondée en 2019, l’association « Mémoire août 1942 », s’est donnée pour mission de participer à un travail de mémoire en collectant et en diffusant des témoignages concernant l’histoire des juifs assignés à résidence dans la région du bassin d’Aiguebelette et de l’avant – pays savoyard durant la seconde guerre mondiale.

Elle s’attache notamment à retracer le parcours de ces femmes, de ces hommes, de ces enfants, et plus précisément, parmi eux, des seize personnes qui ont péri dans les camps de la mort suite à la grande rafle du 26 Août 1942.

Nous cherchons également à retracer le parcours de tous ceux que ces évènements dramatiques ont amenés à séjourner dans notre région et particulièrement les enfants qui ont été cachés, secourus et sauvés grâce aux gens du pays. La rubrique intitulée « sur les traces des familles » vous renseignera sur l’état actuel de nos recherches.

Forts de l’enrichissement et des contributions des témoins ou descendants de témoins, des chercheurs, des passionné-e-s de la mémoire de ces lieux, des citoyens et citoyennes engagé-e-s et de nos différents partenaires, notre association devient un outil de l’expression collective de notre territoire.

Grâce à des manifestations publiques (débats, films, expositions, concerts, conférences…), au travail de sensibilisation en direction des élèves des écoles élémentaires et des collèges, et grâce aussi à ce site internet, nous nous attachons à partager largement cette connaissance, et à la faire retentir face aux remous de notre actualité.

Journée de la mémoire 6 août 2019

Ci-dessus les membres de l’association, ainsi que Simha Arom (rescapé de la rafle du 26 août) et les enfants de Harry Graumann (survivant des camps, raflé à Aiguebelette le 26 août). 

Sur les traces des familles

Famille Gerzterkorn
Famille Finder
Famille Bienes
Famille Arom
Famille Gerzterkorn

Famille Gerzterkorn

Après avoir échappé de peu à la rafle du Veld’Hiv de juillet 1942, Gabriel GERZTERNKORN, sa mère, sa sœur, ses deux tantes et son petit cousin rentrent dans la clandestinité. Ils passent secrètement ligne de démarcation et commencent un périple à travers la zone libre, qui les conduira à Aiguebelette, puis Romans-sur-Isère.Gabriel raconte cette histoire familiale dans son roman autobiographique « Géographie française ».

Famille Finder

Ferdinand FINDER apparait dans notre liste d’Aiguebelette, ainsi que son fils Rudy (Rudolph).

Nous savons qu’il a été déporté en direction de sa ville de naissance, Auschwitz, par le convoi n°64 le 7 décembre 1943. Il avait 48 ans. Toute la famille a péri dans l’holocauste sauf Rudolph, son fils, alors âgé de 17 ans.

Famille Bienes

Nous savons très peu de choses sur Hermann BIENES ainsi que sur les circonstances de sa présence dans le secteur d’Aiguebelette.

Il a été déporté à Auschwitz par le convoi N°47, parti de Drancy le 2 septembre 1942. Il avait alors 51 ans.

Famille Arom

Famille Arom

La famille Arom, David, Liba et les deux garçons, Simha et Elie, étaient internés au camp de Rivesaltes depuis le 26 février 1941. Ils s’en évadent une nuit de juin 1941 et se dirigent sur Lyon.

Après que les enfants aient été mis en lieu sûr dans une colonie d’enfants juifs à Moissac, les parents se retrouvent assignés à résidence en Savoie à Aiguebelette le lac en mars 1942.

En visite à Aiguebelette pour son anniversaire le 26 août 1942, Simha qui a alors 12 ans échappe de justesse à la rafle, grâce à la présence d’esprit de son père.

Simha Arom reçut de ses parents une dernière carte postale en septembre 1942. La carte provenait de Drancy.

David et Liba seront déportés par le convoi n°27 le 2 septembre 1942.

Soixante-dix-sept ans plus tard, la gorge nouée par l’émotion Simha est venu livrer à tous son précieux témoignage. 

Témoignages

Si les archives documentaires représentent une source importante d’information, les témoignages des témoins directs et/ou de leurs familles ne sont pas moins précieux.

Des survivant.e.s rescapé.e.s des camps, rescapé.e.s des rafles, des familles ayant caché des juifs, certain.e.s ont été décoré.e.s de la médaille des justes… Chacun.e  contribue à nous mettre sur la piste des lieux clés et des personnes passées par Aiguebelette dans leur fuite des persécutions. 

Nous tentons dans cette section de rassembler et transmettre les témoignages prenant diverses formes (enregistrements, écrits, conférences, échanges par mail ou téléphone). 

Mathys se souvient bien de moi, j’étais un bébé de 4 mois à peine lorsqu’il a échappé à la rafle

(…) Après leur départ, mon père me raconta ce que Mathys lui avait dit en 1942 : « Il ne fallait surtout pas s’inquiéter, il s’en sortirait toujours, s’il gardait la vie ». Il ajouta, qu’il était arrivé en chemise à la maison la nuit de la rafle d’Aiguebelette du 26 Août 1942. 

Madeleine Bovagnet témoigne : c’était en Août 1965, Mathys Rechtzaïd, son épouse et Maurice leur fils étaient venus en visite rendre visite à la famille BOVAGNET au château « La Ciétaz », sur la commune d’Attignat-Oncin en reconnaissance de secours et protection apportés par la famille Bovagnet pendant la seconde guerre mondiale. C’est chez eux que Mathys s’est réfugié le jour de la grande rafle du 26 Août 1942. Ils vivaient depuis plusieurs années en Bolivie et effectuaient un séjour en France.

Pendant la deuxième rafle, j’étais malade, et ils ont fait toutes les chambres… Alors là c’était les allemands, les militaires… Oui… Ils étaient armés, et … moi j’étais malade. J’étais couchée, et ils sont rentrés dans ma chambre : découverte ! allez ! raouste et coups de cravache sur les jambes ! Et ils me tiraient avec le bras … Et mon frère était dans la monté d’escalier, et qui s’est mis à crier, à hurler : maman vite ! vite ! vite ! ils emmènent Annie ! ils emmènent Annie !… Et moi je savais plus que faire ! Je voulais pas descendre du lit, je résistait tant que je pouvais ! J’avais sous mon lit ce petit de trois ans, dont la mère l’avait caché sous mon lit en lui précisant bien surtout : « Nouni fais attention, ne parle pas, ne dis rien, ne pleure pas, reste, ne bouge pas, surtout ne bouge pas » ! 

Et huit jours avant on avait emmené son père ! Un jeune marié quoi … La maman était toute jeune elle est allée sous les escaliers pour se cacher, parce que mon grand-père l’avait fait fermé par un placard (…) pour descendre à la cave on avait ça sous l’escalier, il y avait une petite porte (…) Elle s’était caché là dedans. Et elle avait mis le petit sous mon lit. Et elle avait mis ses papiers, ses vrais papiers, derrière la plaque du lavabo… (…) Donc ils sont rentrés à deux, là, je les vois, ces deux … soldats, à hurler comme des bœufs (…) ma mère est montée tout de suite tout de suite : « Mais non c’est pas possible ! Fille de prisonnier ! Vous n’avez pas honte ! » Elle s’est mise à les insulter, à leur voler dessus … Y’en a un qui a sorti sa mitraillette (…) Et bien la sentinelle est partie avec elle, à la mairie à huit heure du soir, il faisait nuit noire, heureusement que les institutrices étaient secrétaires de mairie à l’époque ! Heureusement ! Ça m’a sauvé la vie ! Madame Masson. Elle a fait mon certificat de naissance, pas de problème, et il a ramené ma mère au bout de sa mitraillette. Et c’est comme ça que j’ai été sauvée.

Annie Guicherd, petite-fille de Louise Patat qui tenait l’hôtel Beauséjour en 1942, raconte une rafle (extrait d’un entretien oral) :

En Savoie, ce fût trois ans de peur et de privations. Il y a eu de nombreuses rafles. (…) Des maquisards étaient très nombreux, dans la région, et sous la menace, nous dépouillaient du peu de nourriture que nous avions. Les Anglais parachutaient des armes sur une petite île, au centre du lac d’Aiguebelette, ce qui engendrait des représailles. Nous avions la peur au ventre, des Allemands, des soldats Italiens. Nous devons notre survie au maire (de Dullin), qui nous protégeait sous un faux nom : Charles. Mon père allait de ferme en ferme, coudre, et en paiement, rapportait de la nourriture. Personne ne nous a dénoncés.

Lettre de Fanny Kuperberg à Lionel JOSPIN en 2001/2002